Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)

mardi 15 mai 2007

Quel est le plus beau film du monde ? (15)



Soirée cinéma-maison avec des amis hier soir.

Revoir le film de Wise et Robbins dans de bonnes conditions (projection sur grand écran et son 6 canaux) rend justice à une oeuvre que les jeunes générations ont découvert sur un écran de télé.

Le film a été tourné dans le format le plus "large" possible, en 70mm, format aujourd'hui abandonné car fort coûteux.
Les copies 70mm de "West side..." encore en boîte se sont peu à peu détériorées et il ne reste en Europe que de très rares bobines visibles.
L'été dernier, le Max Linder n'a pu projeter le film que dans une copie 35mm Scope, ce qui, à tout prendre, vaut mieux qu'une diffusion sur un tube cathodique (ou même un écran plasma, auquel il me semble impossible de donner un rendu "cinéma").
La videoprojection sur grand écran avec un vp correctement calibré du dvd permet donc d'apprécier cette vision moderne de Roméo et Juliette dont le générique-ouverture de Saul Bass est à lui seul un moment d'anthologie.

Le film parfait étant encore à faire, reste que West Side Story, à presque 50 ans d'âge, se voit et se revoit mille fois sans démériter : acteurs-danseurs ou danseurs-acteurs prodigieux, musique de Bernstein en "classique" du XXème siècle, chorégraphie inspirée de Robbins, réalisation "au couteau" de Robert Wise (cent idées de mise en scène pour le moins bluffantes), décors peaufinés au petit point, photo en decrescendo (clairs-obscurs en final par opposition à la lumière de la première partie), le "film aux 10 Oscar", comme le proclamait la publicité, n'en a pas volé un seul.

Film culte d'une génération (combien de fois l'as tu vu, frangin, à l'époque ?) comme le fut le "Titanic" de Cameron, plus frelaté (signe des temps ?) trente ans plus tard, West Side marqua l'apogée et le début du déclin d'un genre auquel Minnelli et Donen avait donné ses lettres de noblesse.
Aujourd'hui sans ride, ce "vieux" film doit son éternelle jeunesse à son thème universel (on peut aisément transposer à notre temps) en variations shakespeariennes.

Dans la distribution, Nathalie Wood qui, la même année, incarnait l'héroïne d'un autre chef-d'oeuvre, le "Splendor in the grass" (La fièvre dans le sang) de Kazan, en "Maria" tant chantée depuis, illumine le propos, pas seulement mais habitée par son personnage.
Chakiris (Bernardo) ne trouva jamais par la suite de rôle à la hauteur de celui-ci, poursuivant sa carrière en bellâtre ripoliné, notamment, c'en était pitié, sur les plateaux des émissions de Guy Lux lors de ses séjours parisiens, pauvre "crooner" sans envergure.
Le cas de Richard Beymer est tout aussi pathétique : d'emblée, le spectateur jugera qu'il est le bât qui blesse du film, manquant pour beaucoup (dont je ne suis pas vraiment) d'épaisseur pour le rôle de Tony, en "jeune premier".
A l'inverse de Miss Wood, doublée, Beymer possède cependant une voix chaude, sans excès, qui sauve son jeu peu "enthousiaste".
Il poursuivra une carrière sans éclat de tv movies en téléfilms, de personnages de cow-boy en séducteur de service.
Rita Moreno (Anita) et Russ Tamblyn (Riff) en revanche, donnent à leurs personnages une consistance et une énergie récompensées, pour la première, par un Oscar amplement mérité.
Moderne tragédie, jouée, chantée et dansée, West Side Story, sorti en 1961 demeure, comme annoncé dans les "pavés" de presse de l'époque un "spectacle total" intemporel, un cadeau pour vos yeux et vos oreilles, un film essentiel.


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