Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)

samedi 20 septembre 2008

Franz, Maurice, Frédéric et les autres.

J'écoute ce matin l'album de Vladimir Horowitz "Late russian romantics" où cet immense pianiste d'un siècle dernier encore tout chaud, met en relief le côté "fin d'époque" de la musique de Rachmaninov ou Scriabine.
Le fait que le disque soit aujourd'hui introuvable ("indisponible - retiré de la vente" nous dit fnac.com) lui donne la saveur particulière des trésors enfouis.

Je parlais l'autre soir avec l'élève et complice, au cours de l'une de ces conversations nocturnes qui font oublier le temps qui passe, de ce qui fait obstacle à la vulgarisation des musiques que nous aimons.
J'ai employé l'expression "paresse intellectuelle" et nous fûmes conscients de ce qu'elle a de cruel, de ce qu'elle peut apparaître comme condescendante.
Nous devions, me dit-il, garder ce genre de considérations pour nous, pour notre cercle d'initiés, tant, en fin ce compte -qu'il a raison !- , la sentence a quelque chose d'insultant.
Imaginez que je dise à qui se déclare imperméable aux suites de Rameau : "mon cher, c'est de la paresse intellectuelle".
La paresse tout court étant pour moi une manière de vivre (je n'aime rien tant qu'à travailler dans l'urgence), j'aurais donc mauvaise grâce à stigmatiser autrui de ce type de carence.
Mais enfin, élevé dans des casernes, entre "AMX" et "Jeep", pourquoi n'ai-je pas viré "fonctionnaire de police" ou "gendarme mobile" comme mon paternel ?
Peut-être, très jeune, ai-je lutté contre ma "paresse intellectuelle" naturelle.

C'est évidemment le piano, qui me fut, au début, presque imposé car on avait décelé en moi des "dispositions" (ah, le nombre de parents qui décèlent des dispositions chez leurs mômes de 2 ans et demi !), sa découverte et sa pratique, qui détermina mon avenir.
Ils étaient fort surpris ces gamins auxquels, jeudi dernier, je racontais combien il m'était déchirements de quitter mes copains, dans la cour, entre foot et jeux de rôles, pour aller sous les injonctions de ma mère "faire mon piano".
Je n'étais plus Zorro le justicier ou Robin des bois : je montais au deuxième d'un pas traînant sachant trop bien que j'allais m'échiner en gammes monotones et exercices-sévices maudits.
Il y eut bien des crises de larmes, de hurlements, de révoltes, avant la prise de conscience qu'on m'avait confié un trésor inestimable.
Et bien des années pendant lesquelles j'errai aux confins de toutes les musiques, de "variétoche" en "hard-rock" avec arrêt Clo Clo intempestif (à 15 ans, c'est pardonnable !).
Aujourd'hui, Frédéric, Ludwig, Robert, Johannes et beaucoup d'autres me sont amis fidèles, me préservant de la dureté des temps.
Avec tous mes remerciements.

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