Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)

mercredi 16 mars 2011

Truffaut filme Truffaut

Revoir hier soir après tant d'années "La nuit américaine" de François Truffaut (1973) fut un ravissement pour deux des spectateurs, le troisième le découvrant (quelle chance !) avec des yeux d'enfant émerveillé.
Ici, Truffaut filme le cinéma en train de se faire : aux studios de la Victorine, à Nice, une équipe tourne un mélodrame intitulé "Je vous présente Paméla" avec, dans le rôle-titre, une star venue tout spécialement d'Hollywood (la plus que belle Jacqueline Bisset) qui a pour partenaire un acteur connu, Alexandre (Jean-Pierre Aumont) et un jeune premier, Alphonse, interprété par le fils spirituel de Truffaut, Jean-Pierre Léaud.
Si le film eut un tel succès international couronné par l'Oscar du meilleur film étranger, c'est qu'il offrait au spectateur un voyage à l'intérieur du cinéma, dévoilant quelques "trucs" de mise en scène (la pluie, la neige, la "nuit américaine"*, le tournage des scènes "en voiture"...) où Truffaut, qui "se joue" lui-même donne une définition au plus près du réel de son métier : le film est celui d'un homme qui ne respire que par le cinéma ; ainsi lui arrive de Paris un paquet contenant des bouquins qui révèlent quels sont ses "Maîtres" en la matière.
Scène inoubliable que celle ou le cinéaste se revoit en rêve, enfant, volant dans un cinéma les photos promotionnelles de "Citizen Kane" dont on devine  qu'il est la référence ultime...
Il y a bien sûr des "faux-raccords à la Godard", sans doute pour adresser un salut à la "nouvelle vague" mais aussi à celui qui en est le symbole absolu, et cela quelques mois avant que ses deux plus illustres représentants ne se brouillent à jamais.
Truffaut nous permet d'entrer aussi dans la vie personnelle de ses personnages-acteurs, Alphonse-Léaud à la recherche perpétuelle du grand amour tel qu'on est à cet âge, Alexandre-Aumont attendant chaque jour à l'aéroport un jeune homme trop beau qu'il dit vouloir adopter (rares étaient à l'époque les allusions à l'homosexualité), Julie, la star jouée par Jacqueline Bisset, de retour sur un tournage après une dépression sévère...
Un soin particulier est apporté aux rôles de second plan, révélant de nouveaux talents dont Nathalie Baye, Jean-François Stévenin et un Bernard Ménez qui n'a pas joué que des idioties (la preuve !).
Il faut enfin ajouter la musique du grand Georges Delerue, dont le thème en forme de Choral à la J.S Bach ne quittera jamais les mémoires cinéphiles.
Un très grand film.


* La "nuit américaine" est le procédé qui permet de filmer en plein jour, grâce à des filtres, une scène censée se dérouler de nuit.


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