Le journal de Sylvian Coudène.
Humeurs, humours, musiques, cinéma, et autres libertés provisoires.
"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)

lundi 24 octobre 2011

Automnales automneries (3)



Itinéraire bis
Pour rentrer du Caveau, j'ai changé d'itinéraire, choisissant une ligne de métro dont les voitures sont plus spacieuses, plus propres, où l'ambiance est plus détendue.
Cette ligne est empruntée par beaucoup de spectateurs sortant de la représentation.
Selon l'humeur du moment, je suis heureux de croiser des regards souriants, des gens qui me saluent d'un "merci" ou d'un "bravo" (le voyageur lambda, lui, se demande "qui c'est çui-là, j'lai jamais vu à la télé ?"), touchants, spontanés, en reconnaissance d'un bon moment partagé.
Parfois, je le confesse, je n'ai pas envie de les voir, pas envie d'essuyer les compliments, sans savoir vraiment pourquoi.
Quand je serai dans cette humeur-là, je reprendrai dorénavant la ligne toute pourrie dont toutes les voitures sont horriblement taguées et puent la frite de fast-food : je boirai ainsi le calice jusqu'à la lie.

La "télé", c'est (presque toujours) "out"
Autour de moi, de plus en plus d'amis renoncent à la télévision ou refusent de la laisser entrer dans leur intimité.
Chez moi, où l'on peut regarder des films (et uniquement des films) en projection sur 2 mètres et quelques de base, il n'y a qu'un petit récepteur à écran LCD acheté il y a cinq ou six ans pour un prix modique.
Je l'allume rarement, excepté pour les infos, quelques débats politiques et de rares émissions dites "culturelles" ("Ce soir ou jamais" par exemple).
J'ai pris des chaînes cinéma que je n'ai guère le temps, de toutes façons, de regarder ; il y a pourtant des pépites sur TCM (ne pas confondre avec TMC) ou Ciné Classic.
J'ai aussi pris l'option Mezzo pour la musique classique que je peux écouter avec un vrai bon son, mais je n'y pense jamais !
Quand je rentre du théâtre le samedi soir, j'en suis encore à me brancher machinalement sur l'émission de Ruquier : il fut un temps où je regardais ça comme un veau, étendu de tout mon long sur le canapé.
Maintenant, j'éteins très vite, sauf s'il y a, c'est de plus en plus rare, un(e) invité(e) vraiment intéressant(e).
Il est vrai que, ces deux derniers mois, j'étais très accaparé par l'écriture ; faisant une pause, je lis beaucoup :  "classiques", jeunes auteurs, mais aussi littérature d'outre-Atlantique, vive, rythmée, surprenante souvent, sans faux-semblants.
Par contre, je suis un lecteur lent, quand certains de mes amis arrivent à lire un roman en une seule soirée (quelquefois 2 ouvrages, j'en connais au moins un !), ce qui me laisse admiratif.
Lire, ça vous fait prendre conscience de la vanité des programmes télévisés : expositions d'ego surdimensionnés (et le plus souvent injustifiés !), enculage de mouches, nivellement par le bas et, donc, abrutissement des masses que l'on veut dociles, exhibition de la vie intime des gens, mise en condition addictive par le système de la "série", etc.
Certes, de temps en temps, une lueur vous donne de l'espoir (ces cinq minutes de "Mon œil" chaque samedi) où l'autre soir chez Taddeï, cet invité qui parvint à me passionner de par son discours sur l'économie, ce qui, avec moi (et, sans nul doute, des millions d'autres), n'est pas évident.
Le monsieur s'appelle Frédéric Lordon* ; c'est la seule émission de télé à laquelle il a accepté de participer malgré le succès de ses ouvrages, c'est tout dire !
Qu'on partage ou non ses conceptions (la seule solution pour lui est la nationalisation de toutes les banques), il faut applaudir à cette clarté dans la démonstration.
Si vous n'avez pas la télé(sans)vision, allez voir ça ici (intervention à 39 minutes du début) : clic
Là où l'émission est honorable (au vrai sens du terme), c'est qu'elle donne envie... de lire ses livres !

Déconvenue
En ce beau dimanche,  le site du Musée d'Orsay  m'invite à célébrer l'ouverture de ses nouvelles salles (2000 m² tout de même !) ; l'entrée y est gratuite tout le weekend.
Plutôt qu'une retraite en salle obscure, je choisis donc de m'y rendre, impatient de découvrir ces nouveaux espaces que les photos du site incitent à découvrir illico.
J'ai une solution de repli au cas où la foule serait trop dense.
Au lieu de ça, je constate une certaine fluidité aux abords du musée.
Et pour cause :


Je peste, bien sûr, mais constate, via une autre affiche, que le "dégraissage" de la fonction publique continue de faire des ravages : 2000 m² supplémentaires, oui, mais pas un employé de plus...
Sachant que, de surcroît, la Direction du Musée veut faire passer la fréquentation de 3 à 4 millions de visiteurs par an, on peut comprendre les inconvénients qu'auraient à subir non seulement le personnel mais aussi le public.
On râle donc, mais on comprend.
Faisant contre mauvaise fortune bon cœur,  je fais une longue promenade sur les quais où parisiens et touristes profitent de la température clémente ; je mets mon pull sur ma veste, négligemment noué à la "centriste".
Il fait chaud en effet ; sous cette belle lumière, Paris resplendit, que l'on ne regarde plus assez quand on y vit :
c'est beau !

Papilles
Pour revenir aux choses sérieuses, la fraîcheur bien venue de cet automne réveille des envies de nourritures roboratives, canailles, d'ici, quoi !
Je me régale d'avance de la bouillabaisse que je dégusterai très prochainement "en bas", d'autant qu'il me sera agréable de faire découvrir ce mets explosif en bouche à quelqu'un qui n'en a jamais dégusté.
Mes papilles, à l'approche de l'hiver, salivent d’espérances de pot-au-feu (une bouillabaisse de viandes ?), de blanquette de veau, de fricassées de champignons (photo), de choucroute de chez Schmidt, de petit-salé aux lentilles, de potée auvergnate, d'aligot...
C'est fou comme certaines boissons et nourritures se confondent avec le climat : pour le poulpe, il me faut une lagune entre Zattere et Giudecca ou une plage de sable près d'Athènes ; on boira du Pinot Griggio en terre légèrement brûlée ; la froidure nous mènera vers un Saint Emilion charpenté, boisé, calorifique.
Comme dirait Vivaldi, toute saison est bonne à vivre.


*De Frédéric Lordon, France 3 nous dit :
Economiste, directeur de recherches au CNRS, collaborateur au « Monde Diplomatique », auteur de nombreux ouvrages de sciences économiques et sociales tel « Jusqu’à quand ? Pour en finir avec les crises financières », « La crise de trop - Reconstruction d’un monde failli ». Il est également l’auteur d’une pièce de théâtre intitulée, « D’un retournement l’autre. Comédie sérieuse sur la crise financière, en quatre actes et en alexandrins », paru au Seuil en mai 2011 (et dont Denis Podalydès avait fait la lecture au 104 à Paris l’été dernier).


3 commentaires:

Kynseker a dit…

Je veux manger la fameuse choucroute !

Sinon, sur Lordon, un discours assez atypique, pas utopique mais quand même orienté. Si tu l'aimes vraiment, 2 ou 3 émissions d'Arrêt sur Images sont pleinement consacrées à ses thèses qu'il défend avec clarté et vigueur. Comme quoi Taddei n'était pas le premier à le faire passer à la télé !

Silvano a dit…

Passage télé depuis la publication du dernier ouvrage précisé-je.

La choucroute, ça viendra, pour sûr !

B. a dit…

Et la truffade alors ?